Aujourd’hui, c’est la nomade sédentaire linguiste (et un peu philosophe tout de même) qui vous écrit, pour vous parler de ce mot relativement nouveau dans la langue française: la sérendipité.
Christophe Colomb, navigateur sérendipiteur
La sérendipité. Vous avez peut-être déjà entendu le terme anglais (serendipity), on l’entend plus rarement en français. Mais que désigne exactement ce mot si difficile à mémoriser – parce qu’il ne ressemble à aucun autre mot connu, qu’il n’exhibe aucune étymologie? Pourtant, tel Monsieur Jourdain, nous pratiquons tous la sérendipité sans le savoir, de manière plus ou moins consciente.
La sérendipité, c’est l’art de découvrir des choses que l’on ne cherchait pas. Prenons par exemple Christophe Colomb, parfait “sérendipiteur” ou, dans la version plus moderne et simplifiée, celui qui surfe sur le Net, qui navigue de lien en lien et qui, soudain, trouve quelque chose de plus intéressant que ce qu’il cherchait.
Coworking = sérendipité
Si je vous parle de sérendipité sur ce blog, consacré à la consommation collaborative sous toutes ses formes, c’est parce que depuis que je pratique le coworking, un mode de travail (que j’ai déjà évoqué dans d’autres billets, comme celui-ci, ou celui-ci) lui-même issu de la sharing economy, la sérendipité est plus présente que jamais dans ma vie.
Prenons le simple fait d’avoir opté pour cette nouvelle forme de travail: en m’inscrivant dans un centre de coworking, quel était mon but au départ? C’est simple: trouver un endroit calme pour travailler, prendre de la distance avec mon espace et mon milieu de vie, mieux séparer travail et vie privée, et puis aussi, accessoirement, avoir accès à la climatisation – plus agréable, en été. Tel Christophe Colomb qui partait à la découverte des Indes, je m’en allais trouver un espace de travail plus confortable, et c’est tout.
Quand on ne cherche pas, on trouve
Seulement voilà, les semaines passant, j’ai commencé à découvrir des choses que je ne cherchais pas – “quand on ne cherche pas, on trouve”, comme le dit le dicton.
Grâce au coworking, j’ai ainsi d’abord découvert l’énergie que procure le fait d’être entouré de ses pairs: jusque-là, je fréquentais peu d’indépendants. L’Homme est un animal social, qui a besoin de sentir qu’il appartient à une communauté. Jusque-là, lorsque mes amis me parlaient de leurs congés payés, de leur chef, de leurs horaires de travail, de la cantine du boulot, de leurs collègues, j’avais du mal à me sentir concernée. De mon côté, je me sentais peu comprise lorsque je parlais cotisations sociales, versements anticipés, ou que j’évoquais mes hésitations à prendre des vacances à cause du manque à gagner que cela provoquerait dans mes finances.
Grâce au coworking, ce temps est révolu: entre indépendants, nous avons les mêmes préoccupations, les mêmes objectifs. J’ai aujourd’hui le sentiment que j’appartiens à une communauté et je me sens moins seule dans toutes ces questions.
J’ai trouvé mieux que ce que je cherchais – vous avez dit sérendipité?
Ensuite, j’ai découvert de nouveaux horizons professionnels potentiels: dans un centre de coworking, on rencontre tous les métiers ou presque (allez jeter un oeil sur la liste des membres du centre dont je suis membre) : des informaticiens, des développeurs, des architectes, des juristes, des marketers, des spécialistes de la communciation, des copywriters, des traducteurs (ah bon?), etc. Autant de professions que l’on côtoie peu dans la vie de tous les jours. Encore une chance! Quelle formidable occasion, en effet, d’ouvrir son esprit à de nouveaux horizons!
C’est ainsi qu’en quelques mois, sous l’effet combiné de cette énergie contagieuse, de cette envie de chacun de partager son savoir, de cette solidarité toute naturelle entre coworkers et de ma soif d’apprendre, j’ai, moi qui étais jusque-là relativement hermétique (et c’est peu dire) aux nouvelles technologies d’une manière générale: créé ce blog (et oui, il est lui-même, plus ou moins directement, le résultat de ma pratique du coworking, grâce aux rencontres que j’y ai faites et à l’inspiration que m’ont donnée certaines personnes – notamment mon voisin de droite (nous avons, volontairement, nos petites places habituelles, dans la salle où je travaille), qui se reconnaîtra – F., si tu me lis…); créé une page Facebook (quoi?? Vous n’avez pas encore “liké” ma page? C’est le moment de le faire!); ouvert un compte Twitter (ça, c’était facile) et compris son utilité (ça, c’était moins évident a priori); ouvert un compte sur Buffer (ça, c’est grâce à Ramon, le chef d’orchestre du Betacowork et auteur du Coworking Handbook); appris à l’utiliser, et bien d’autres choses encore.
J’ai aussi fait l’expérience du Startup Weekend (ça, c’est grâce à un autre de mes coworkers, un développeur, cette fois – qui se reconnaîtra lui aussi -, qui m’a un jour interpellée dans la cuisine du coworking pour me parler de mon blog et de son idée d’appli et, de fil en aiguille, a fini par me parler du Startup Weekend, dont je n’avais jusque-là jamais entendu parler – et quelle belle expérience ce fut-là (comme je le raconte ici)! P., si tu me lis!
Au-delà de toutes ces découvertes, grâce à mon voisin de droite, toujours, qui m’a notamment fait découvrir son livre, Marketer son écriture, aussi intéressant qu’amusant, j’ai aujourd’hui l’ambition d’apprendre un nouveau métier à côté de la traduction: celui de copywriter.
J’ai trouvé mieux que ce que je cherchais – vous avez dit sérendipité?
La chance ne sourit qu’aux esprits bien préparés
Je pourrais encore vous citer un tas d’autres exemples, plus ou moins personnels, mais je m’arrêterai là pour aujourd’hui. Je suppose que vous avez compris l’idée, à ce stade. Vous aussi, dans votre vie de tous les jours, vous “sérendipitez” sans doute sans le savoir: il peut s’agir d’une rencontre, d’une découverte sur Internet, d’un livre, d’un film, d’un endroit, d’une idée – autant de choses que vous avez faites au départ dans un but X et qui vous offre, au final, l’occasion de découvrir Y, encore mieux que X.
Songez-y! Et soyez ouverts à ces découvertes. Prenez-les comme des cadeaux. Soyez attentifs, aussi, car on ne se rend pas toujours compte à temps de leur apparition dans notre vie. Car n’oubliez pas, comme disait Pasteur: “La chance ne sourit qu’aux esprits bien préparés”. Alors, préparez le vôtre, découvrez, amusez-vous et… dégustez!
La nomade sédentaire
Très bon article. La curiosité mène à tout, et c’est bien cela qu’il faudrait développer dans l’enseignement. Comme je l’écrivais encore dans une intervention sur un forum, l’école est un lieu où l’on apprend à devenir d’abord des êtres humains. Or, assistant Il y a quelques mois , avant les elections, à une table ronde, j’entendais les représentants politiques parler de synergies entre les écoles et les entreprises. Si le fait de diriger les jeunes vers des filières d’emploi est louable, est-ce pour autant une solution sur le long terme? Que sera le marché du travail dans 5 ans, 10 ans, personne ne le sait. A un jeune qui me demanderait ce qu’il devrait faire comme études, je lui dirais de faire ce qu’il aime. Il découvrira certainement des choses qu’il ne connaissait pas, qui le passionneront et qui lui ouvriront d’autres portes. La sérendipité, on peut aussi, et je dirais même que l’on doit la trouver à l’école.